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Affichage des articles dont le libellé est Article 13 RPCR. Afficher tous les articles
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jeudi 18 avril 2024

T1006/21: les requêtes procédurales ne sont pas des modifications au sens des articles 12 et 13 RPCR

La division d'opposition avait jugé que le brevet ne bénéficiait pas de la priorité car la demande prioritaire P1 (une demande provisoire US) n'avait pas été déposée par le même déposant que le brevet.

Dans son opinion provisoire, la Chambre avait émis l'opinion selon laquelle l'invention ne découlait pas de manière directe et non ambiguë du contenu de P1. La Titulaire avait alors demandé un renvoi en première instance de manière à bénéficier d'un double degré de juridiction sur cette question.

L'Opposante demandait à ce que cette requête en renvoi ne pas admise dans la procédure car formulée tardivement.

La Chambre rappelle que le renvoi dépend de son pouvoir discrétionnaire et qu'une telle décision de renvoi peut être prise d'office, à tout moment de la procédure. Une décision de renvoi est donc indépendante de toute requête par les parties, et peut être prise même en l'absence de telles requêtes. Une requête en renvoi formulée par une partie n'est donc pas soumise aux dispositions des articles 12 et 13 RPCR.

Les articles 12 et 13 RPCR servent à prendre en compte les changements dans les faits ou dans l'objet de la procédure, et visent donc les requêtes (jeux de revendication), les (allégations de) faits et les preuves, c'est-à-dire les questions de fond, les objections et arguments associés.

Des requêtes procédurales ne sont pas des modifications au sens des articles 12 et 13 RPCR.

De telles requêtes comprennent notamment: les requêtes en renvoi et en saisine de la Grande Chambre, les requêtes visant l'irrecevabilité du recours, les requêtes concernant la non admission de requêtes, d'allégations de faits ou de preuves, les requêtes en interruption de la procédure, les requêtes en procédure orale, les requêtes visant à l 'exclusion d'un membre, ou encore les requêtes en changement de la date de la procédure orale, les requêtes en accélération de la procédure, les requêtes selon la règle 106 CBE ou encore les requêtes en suspension de la procédure.

Ces requêtes de nature procédurale peuvent être soumises à tout moment de la procédure et doivent être prises en compte par les Chambres.


Décision T1006/21

mardi 9 avril 2024

T2124/21: retour à la requête rejetée par la division d'examen

Avec son mémoire de recours, la Demanderesse avait soumis une nouvelle requête principale ainsi que de nouvelles requêtes subsidiaires. Dans son avis provisoire, la Chambre se prononçait contre l'admission de ces requêtes dans la procédure, au motif que la Demanderesse n'avait pas expliqué pourquoi elle ne soumettait ces requêtes qu'au stade du recours, et qu'elles ne respectaient pas à première vue l'article 123(2) CBE. En réponse, la Demanderesse avait remplacé les requêtes par une nouvelle requête correspondant à celle rejetée par la division d'examen.

La Demanderesse argumentait que la prise en compte de cette requête correspondait à l'objet premier du recours, qui était de réviser la décision attaquée. En outre, la modification ne donnait pas lieu à de nouvelles discussions techniques. Enfin, les objections au titre de l'article 123(2) CBE étaient surprenantes.

La Chambre fait remarquer que cette nouvelle requête constitue une modification des moyens et qu'il faut donc appliquer l'article 13(2) RPCR.

Si l'objet premier du recours est de réviser la décision attaquée, la Demanderesse a fait le choix dès le début du recours de ne pas chercher une telle révision, et a donc empêché la Chambre de procéder à cette révision. On ne peut attendre de la Chambre qu'elle commence une telle révision seulement au dernier stade de la procédure de recours.

Faute de circonstances exceptionnelles justifiant le dépôt de la nouvelle requête, cette dernière n'est donc pas admise dans la procédure et le recours est rejeté.


Décision T2124/21

jeudi 28 mars 2024

T655/21: une Chambre peut réviser des parties de décisions qui n'ont pas été contestées

Alors que la décision de rejet de l'opposition traitait de 7 attaques de nouveauté et 4 attaques d'activité inventive (dont une partant de D18), l'Opposante (en l'espèce l'Union Européenne) n'avait formulé dans son mémoire de recours qu'une attaque de nouveauté au regard d'un document D26 que la division d'opposition n'avait pas admis dans la procédure.

Dans son opinion provisoire, la Chambre estimait que l'invention n'impliquait pas d'activité inventive au regard de D18.




La Titulaire argumentait que la Chambre aurait dû limiter son examen aux moyens soulevés par l'Opposante, en l'espèce la nouveauté par rapport à D26, et citait en particulier la décision T1799/08

Mais cette affaire concerne un cas dans lequel l'opposant était resté totalement passif, et la Chambre avait estimé qu'on ne devait pas attendre d'elle un examen approfondi de motifs qui n'ont pas été dûment étayés par l'opposant. Dans le cas d'espèce la décision est très détaillée et le Chambre peut procéder à une révision judiciaire au sens de l'article 12(2) RPCR.

La Chambre ne voit aucune base juridique pour une limitation de ses pouvoirs. L'article 114(1) CBE et l'article 101(3) CBE permettent au contraire un examen complet. La seule limitation provient de G9/91 et G10/91: le Chambre ne peut examiner un nouveau motif d'opposition sans le consentement du titulaire.

L'Opposante ayant repris à son compte l'attaque partant de D18, il s'agit d'une modification de ses moyens.

La Chambre considère que des circonstances exceptionnelles justifient l'admission de cette modification. La Chambre prend en compte le caractère inhabituellement restreint des soumissions de l'Opposante, et le fait que l'évaluation de la pertinence de D26 représente une grande partie de ces soumissions, conduisant la Chambre à consacrer du temps à l'analyse de la pertinence de D26, pour en déduire que D26 n'est pas plus pertinent que D18 car l'information pertinente de D26 est déjà contenue dans D18. La Chambre a considéré que par souci d'économie de procédure il était plus opportun d'éviter une analyse de D26 et d'examiner un aspect substantiel détaillé dans la décision, à savoir l'activité inventive en partant de D18. Ce faisant, la Chambre a contribué à rendre "exceptionnelles" les circonstances de l'affaire, a confirmé la responsabilité de l'OEB envers le public de ne pas maintenir des brevets invalides et a simplifié la procédure en cours. 

Au final, la Chambre confirme son opinion provisoire, rejette la requête principale, admet une nouvelle requête subsidiaire, admet D26 dans la procédure compte tenu de sa pertinence vis-à-vis de cette nouvelle requête, et renvoie l'affaire devant la division d'opposition.


Décision T655/21








lundi 18 mars 2024

T1800/21: suppression d'une catégorie, clap de fin ?

Un sujet qui revient régulièrement sur ce blog: celui de la recevabilité de requêtes tardives dans lesquelles une catégorie de revendications a été supprimée (par exemple suppression des revendications de produit pour ne garder que les revendications de procédé).

Certaines décisions (par exemple T1480/16) considéraient qu'il ne s'agissait pas d'une modification des moyens au sens de l'article 13 RPCR, en tout cas lorsque la situation de fait n'était pas modifiée, de sorte que la Chambre ne dispose pas du pouvoir discrétionnaire pour ne pas admettre la requête dans la procédure. D'autres décisions (par exemple T1857/19) ont considéré que toute suppression de ce type était une modification des moyens, mais que des circonstances exceptionnelles au sens de l'article 13(2) RPCR pouvaient exister lorsque les modifications allaient dans le sens d'une économie de la procédure et répondaient clairement aux objections existantes sans en soulever de nouvelles. 

Dans le cas d'espèce, la Titulaire avait soumis après la citation à la procédure orale une requête subsidiaire dans laquelle elle avait supprimé les revendications de procédé pour ne garder que des revendications de dispositif. 

La Chambre se rallie à la jurisprudence clairement dominante: il s'agit en tout état de cause d'une modification des moyens. La suppression des revendications de procédé conduit à devoir examiner les revendications de dispositif, et ne peut donc être vue comme une simple renonciation à une partie de l'objet revendiqué. La question de savoir dans quelle mesure les questions ont déjà été discutées ne sont pas pertinentes pour savoir s'il s'agit d'une modification. Elles le sont pour l'exercice du pouvoir d'appréciation à effectuer dans un deuxième temps.

Sur l'existence de circonstances exceptionnelles, la Chambre note que son opinion provisoire ne faisait que reprendre les arguments de l'Opposante. Elle considère toutefois qu'elle ne doit pas limiter la notion de "circonstances exceptionnelles" aux réactions à une évolution tardive de la procédure, qui n'est qu'un exemple possible. La faculté de ne pas prendre en compte des moyens tardifs n'est pas une fin en soi mais sert les principe d'économie et d'équité de la procédure. Il ne s'agit pas d'interdire des restrictions appropriées dans le cadre déjà discuté. Les circonstances exceptionnelles ne doivent pas nécessairement être liées au déroulement de la procédure mais peuvent aussi être de nature juridique (T2295/19).

La Chambre considère qu'une jurisprudence uniforme se dessine: si la suppression d'une catégorie donne lieu à une requête sur la base de laquelle un brevet peut à première vue être maintenu, des circonstances exceptionnelles peuvent exister si la modification ne modifie pas le cadre factuel et juridique de la procédure, ne nécessite pas une nouvelle évaluation de l'objet de la procédure et n'est pas contraire à l'économie de la procédure ou aux intérêts légitimes d'une partie.

Cette jurisprudence s'inscrit dans le cadre des niveaux de convergence. 

Dans le cas d'espèce, les revendications de dispositif avaient été discutées en procédure écrite, et auraient de toute façon dû être discutées si les revendications de procédé avaient été considérées comme valables. La modification est simple, supprime évidemment toutes les objections soulevées à l'encontre des revendications de procédé, ne soulève pas de nouvelles questions, et la Chambre avait émis un avis positif à l'encontre des revendications de dispositif. La Chambre décide donc d'admettre la requête dans la procédure.


Décision T1800/21 (en langue allemande)

mercredi 27 décembre 2023

T664/20: dans son mémoire, l'opposante est tenue d'attaquer par avance toutes les requêtes présentées en première instance

La division d'opposition avait maintenu le brevet selon la requête subsidiaire 2, et aussi bien l'opposante que la titulaire avaient formé recours contre cette décision.

Dans son mémoire de recours, la titulaire n'avait déposé que la requête principale et les requêtes subsidiaires 1 et 2 déjà discutées dans la décision attaquée. Ce n'est que dans sa réponse au mémoire de recours de l'opposante qu'elle avait en outre déposé les requêtes subsidiaires 3 à 15, identiques à celles qu'elle avait soumises deux mois avant la procédure orale devant la division d'opposition.

En réponse au dépôt de ces requêtes, l'opposante avait cité un nouveau document D24, pertinent à l'égard de la requête subsidiaire 3. Elle argumentait que ce document n'avait pas pu être déposé en première instance, étant donné que cette requête, qui ajoutait une caractéristique issue de la description, avait été déposée seulement deux mois avant la procédure orale.

La Chambre rappelle que selon l'article 12(3) RPCR, le mémoire exposant les motifs du recours doit contenir l'ensemble des moyens invoqués par un requérant (opposant) dans le cadre du recours.

Les requêtes subsidiaires 3 à 15 ayant déjà été déposées devant la division d'opposition, l'opposante devait s'attendre à ce que la titulaire redépose les requêtes subsidiaires 3 à 15 dans la procédure de recours. La Chambre considère donc que la titulaire aurait dû aborder ces requêtes dans son mémoire exposant les motifs du recours et fournir au plus tard à ce stade le document D24.

Le document D24 n'est donc pas admis dans la procédure de recours en application des articles 13(1) et 12(3) RPCR.

La Chambre propose le résumé suivant: 

Le mémoire exposant les motifs du recours d'un requérant (opposant) doit comprendre l'ensemble des moyens couvrant toutes les requêtes pendantes devant la division d'opposition, y compris celles qui n'ont pas été considérées dans la décision contestée. Faute de quoi, le requérant s'expose à ce que des moyens déposés après le mémoire exposant les motifs du recours et visant des requêtes subsidiaires pendantes devant la division d'opposition et déposées en réponse au mémoire de recours par le propriétaire du brevet soit écartés de la procédure 

Cette décision appelle plusieurs commentaires.

Selon l'article 12(2) RPCR, l'objet premier d'un recours est la révision de la décision attaquée, de sorte que les moyens invoqués par les parties doivent porter sur les requêtes, faits etc.. sur lesquels la décision était fondée. Il paraît alors surprenant d'exiger d'une opposante qu'elle vise dans son mémoire des requêtes qui n'ont pas fait l'objet de la décision. Il semble aussi étonnant d'exiger qu'elle attaque par avance des requêtes qui ne sont pas encore dans la procédure de recours, et dont elle ne peut savoir si elles seront redéposées en recours. 

On fera aussi remarquer que si la titulaire avait déposé ces requêtes dans son propre mémoire, l'opposante aurait pu y réagir dans sa réponse et l'article 13(1) RPCR n'aurait pu être invoqué. Et il nous semble aussi que l'article 12(3), qui vise non seulement le mémoire mais aussi la réponse au mémoire de la partie adverse, n'aurait pas pu être invoqué. Stratégiquement, une titulaire aurait donc intérêt à ne pas soumettre avec son mémoire de recours des requêtes subsidiaires déposées mais non-discutées en première instance, et à attendre sa réponse au mémoire de l'opposante pour le faire. 


Décision T664/20

lundi 6 novembre 2023

T2352/19: une nouvelle objection n'est pas forcément une circonstance exceptionnelle

La Titulaire justifiait le dépôt de sa nouvelle requête subsidiaire par le fait que l'opinion de la Chambre suggérait une nouvelle interprétation possible pour l'organe de commande de la revendication 1, en indiquant que les deux leviers 43 et 44 du document O2 pourraient correspondre à un tel organe.


Toutefois, l'opinion indiquait en outre, suivant en cela les arguments de l'Opposante, que la présence d'un levier pivotant dans un autre mode de réalisation de O2 détruisait la nouveauté de la revendication 1. Et de fait, lors de la procédure orale, la conclusion de la Chambre quant au défaut de nouveauté était basée sur cette deuxième objection. La nouvelle objection n'a donc pas eu d'impact sur la décision finale.

La Chambre considère que si, comme dans le cas présent, il n'existe aucun lien de causalité entre l'objection nouvellement soulevée et la conclusion finale de la Chambre, cette nouvelle objection ne constitue pas une circonstance exceptionnelle au sens de l'article 13(2) RPCR 2020 qui pourrait justifier la prise en compte de la nouvelle demande.

Le droit d'être entendu exige la possibilité de se défendre contre une nouvelle objection, mais si la décision ne se base pas sur cette nouvelle objection, une telle défense n'est pas nécessaire. 

Le simple fait que l'introduction d'une nouvelle requête soit déclenchée par l'opinion provisoire de la Chambre n'entraîne pas nécessairement sa recevabilité. La requête a pu être présentée comme une tentative légitime de traiter la nouvelle objection, mais la légitimité de la tentative cesse d'exister si l'objection nouvelle n'est pas pertinente pour la décision. 

A l'argument de la Titulaire selon lequel la requête aurait pu être admise si la Chambre avait d'abord traité cette nouvelle objection, la Chambre rétorque que la recevabilité d'une requête n'est décidée qu'au moment où cette requête devient pertinente et non en avance, afin de s'assurer que toutes les circonstances précédente sont prises en compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance l'économie de la procédure et le droit d'être entendu.


Décision T2352/19

jeudi 21 septembre 2023

T1566/19: le changement de mandataire n'est pas une circonstance exceptionnelle

La requête subsidiaire 4 avait été rejetée car elle comportait l'ajout d'une nouvelle revendication 3 qui n'avait pas d'équivalent dans les revendications du brevet délivré. La règle 80 CBE n'était donc pas respectée.

En procédure orale, la Titulaire a proposé une nouvelle requête subsidiaire dans laquelle cette revendication 3 a été supprimée.

Le mandataire justifiait cette modification en argumentant qu'il s'agissait de corriger l'erreur faite par le précédent mandataire. 

La Chambre considère que le changement de mandataire, qui relève du contrôle de la partie considérée, ne peut être invoqué pour établir des circonstances exceptionnelles au sens de l'article 13(2) RPCR. Les circonstances exceptionnelles peuvent être des développements nouveaux ou imprévus dans la procédure de recours qui se situent en dehors de la sphère d'influence de la partie concernée, tels que de nouvelles objections soulevées par la Chambre ou une autre partie. 

En outre, cela n'explique pas pourquoi la requête n'a pas été déposée plus tôt, sachant que le changement de mandataire a été effectué plusieurs mois avant la procédure orale et que l'objection au titre de la règle 80 CBE figurait dans l'opinion provisoire de la Chambre.

Des circonstances exceptionnelles ont également été reconnues dans la jurisprudence si l'admission d'amendements n'était pas préjudiciable à l'économie de la procédure. Tel n'est pas le cas en l'espèce car les modifications soulèvent de nouvelles objections au titre des articles 76(1) et 123(2) CBE, auxquelles la Titulaire n'a pas répondu dans ses écritures.

La requête subsidiaire n'est donc pas admise dans la procédure.


Décision T1566/19


mercredi 16 août 2023

T1906/19: pas toujours besoin de circonstances exceptionnelles

 

Selon l'article 13(2) RPCR, toute modification des moyens présentée par une partie après l'expiration d'un délai imparti par la Chambre dans une notification au titre de la règle 100(2) CBE ou, en l'absence d'une telle notification, après la signification d'une citation à une procédure orale n'est, en principe, pas prise en compte, sauf en cas de circonstances exceptionnelles, que la partie concernée a justifiées avec des raisons convaincantes.

Il découle du "en principe" que cette règle fixe donc une règle de base (les modifications ne sont prises en compte qu'en cas de circonstances exceptionnelles dûment justifiées), mais tout en laissant une marge de manœuvre limitée pour les exceptions (une modification peut être prise en compte malgré l'absence de telles circonstances exceptionnelles).

Dans l'approche convergente, il est logique que la Chambre dispose d'un pouvoir discrétionnaire non seulement pour les deux premiers niveaux, mais aussi pour le troisième. La Chambre considère que le législateur a, dans sa sagesse, vu que le libellé sévère de l'article 13(2) devait être assorti d'une réserve prenant en considération les circonstances particulières d'un cas.

Dans le cas d'espèce, la Demanderesse avait déposé une nouvelle (et unique) requête corrigeant un problème nouvellement apparu lors de la procédure orale au sujet d'une caractéristique mais en oubliant de supprimer cette caractéristique dans la revendication 12, de sorte qu'elle avait à nouveau déposé une requête modifiée. Les modifications étaient simples et ont conduit à un jeu prima facie acceptable. La succession de requêtes n'a pas portée atteinte au principe d'économie de la procédure. 


mardi 8 août 2023

T2465/19: modification admise même en l'absence de circonstances exceptionnelles

Dans sa notification selon l'article 15(1) RPCR, la Chambre avait indiqué qu'elle était convaincue de la présence d'une activité inventive, mais mentionnait certains problèmes d'article 123(2) CBE (concernant une revendication dépendante) et de clarté (dans la description). La notification invitait à déposer des modifications permettant de résoudre les problèmes soulevés bien avant la procédure orale.

La Demanderesse avait réagi en renvoyant un jeu de revendications modifié ainsi qu'une description adaptée.

Même si la Chambre ne voit pas de "circonstances exceptionnelles" au sens de l'article 13(2) RPCR, elle admet la nouvelle requête dans la procédure. Certaines objections de la Chambre n'étaient en effet pas nouvelles, et l'invitation à adapter la description, si elle était nouvelle, ne pouvait certainement pas surprendre. la Chambre aurait donc pu ne pas admettre les modifications sur la base de l'article 13(2) RPCR. 

La Chambre considère toutefois que la situation procédurale est conforme à l'intention législative sous-tendant la structure des articles 12 et 13 RPCR. Ces dispositions visent à éviter de soulever de nouvelles questions dont on ne peut s'attendre à ce qu'elles soient traitées par la Chambre et les autres parties dans le cadre prévisible de la procédure de recours. Dans le cas d'espèce, les modifications ne soulèvent pas de nouveaux problèmes, et ne sont donc pas contraires à l'économie de la procédure. Le fait de n'adapter la description qu'après l'établissement d'un jeu de revendications acceptable est en outre une pratique bien établie.

Même si l'on peut généralement attendre que la Demanderesse justifie le dépôt tardif des modifications, cela serait contre-intuitif dans un cas où elles ont été déposées à la demande expresse de la Chambre. Cette dernière est bien consciente de la raison pour laquelle les modifications ont été déposées, de sorte qu'aucun argument détaillée n'est exigé dans le cas présent.

lundi 12 juin 2023

T1807/15: c'est la première citation qui déclenche le 3e niveau de convergence

Lors de la première procédure orale devant la Chambre, cette dernière avait fait droit à la demande de saisine de la Grande Chambre formulée par la Requérante concernant la question de la légalité des procédures orales par visioconférence, et avait ajourné la procédure orale. Une deuxième procédure orale a eu lieu ultérieurement.

La Requérante avait soumis les documents E7 à E11 après la première procédure orale mais avant la convocation à la deuxième procédure orale. Elle argumentait que l'article 13(2) RPCR 2020 ne s'appliquait pas à ces soumissions car c'était la deuxième citation à procédure orale qu'il fallait prendre en compte. 


La Chambre rejette ces arguments, en particulier basés sur des affaires (par exemple T950/16) dans lesquelles la première citation avait été envoyée avant l'entrée en vigueur du RPCR 2020, la deuxième ayant été envoyée après. Dans le cas d'espèce, les deux citations ont été envoyées après le 1.1.2020.

La citation à la procédure orale constitue un événement déclencheur objectif et prévisible pour le troisième niveau de convergence. A ce moment, la Chambre peut considérer que toutes les soumissions des parties sont au dossier et que le cadre des discussions est fixé. Les développements procéduraux ultérieurs ne doivent pas avoir d'impact car sinon le déclenchement du troisième niveau serait imprévisible et à la disposition d'une partie, voire dépendant d'événements aléatoires.

A la Requérante qui argumentait qu'elle ne pouvait s'attendre à ce que les questions de fond ne soient pas discutées lors de la première procédure orale, la Chambre rétorque qu'une partie qui conteste la légalité d'une procédure orale par visioconférence, question d'importance fondamentale, ne peut s'attendre à ce qu'une discussion sur le fond du dossier ait lieu lors de cette procédure orale, quand bien même la requête en saisine ait été présentée comme subsidiaire et ait été ensuite retirée. 

Ainsi, lorsque plusieurs convocations sont émises après l'entrée en vigueur du RPCR 2020, l'article 13(2) RPCR se réfère à la première convocation.



jeudi 1 juin 2023

T532/20: une combinaison des revendications délivrées est une modification des moyens

La Titulaire avait déposé pendant la procédure orale de recours une requête subsidiaire A correspondant à une combinaison des revendications 1, 4 et 8 du brevet délivré.

Elle prétendait qu'il ne s'agissait pas d'une modification des moyens au sens de l'article 13 RPCR, s'agissant au final d'une simple suppression des autres revendications du brevet délivré. La Chambre n'avait donc pas le pouvoir de ne pas l'admettre dans la procédure.

Sans surprise, la Chambre ne partage pas cette opinion. 

Elle admet que certaines décisions ont considéré que la suppression de revendications indépendantes ou dépendantes ou encore d'alternatives dans des revendications a parfois été considérée comme n'étant pas une modification des moyens, dans des contextes particuliers, notamment lorsque cela ne changeait pas la nature des discussions et le cadre juridique et factuel, c'est-à-dire simplifiait la procédure sans apporter de nouveaux sujets à discuter. Aucune de ces décisions n'a traité le cas d'une suppression de toutes les revendications indépendantes.

La Chambre est en outre réservée sur cette approche, préférant considérer qu'il s'agit dans tous les cas d'une modification des moyens. Le fait que cette modification ne fasse que limiter les points à débattre serait alors un critère à prendre en compte pour la recevabilité, voire représenter des circonstances exceptionnelles au sens de l'article 13(2) RPCR.

Dans le cas d'espèce, la nouvelle requête introduit clairement de nouveaux sujets à discuter. Normalement, on n'examine pas chacune des revendications dépendantes d'une requête. Les caractéristiques des revendications 4 et 8 n'ayant jamais été débattues jusqu'ici, cette requête représente bien une "affaire nouvelle" (fresh case) et ne doit pas être admise.



lundi 2 janvier 2023

T2599/19: une objection hypothétique ne peut justifier des amendements tardifs

La demanderesse avait modifié en profondeur sa requête principale en réponse aux objections formulées par la Chambre dans son avis provisoire. Ces objections constituaient selon elle une circonstance exceptionnelle justifiant l'admission de cette requête.

La Chambre ne partage pas ce point de vue. Elle fait remarquer que dans son opinion elle indiquait d'abord ne pas être encline à admettre l'ancienne requête principale, nouvellement soumise en recours, sur le fondement de l'article 12(4) RPCR 2007.

Les objections de fond étaient donc de nature hypothétique, conditionnées à l'admission de l'ancienne requête principale. Ce n'est en effet que lorsqu'une requête est admise dans la procédure que les objections deviennent effectives. Une objection hypothétique ne peut en aucun cas justifier des amendements correctifs.

Lors de la procédure orale devant la division d'examen, la demanderesse s'était abstenue de déposer des requêtes subsidiaires. Examiner une nouvelle requête au stade du recours irait à l'encontre des principes d'efficacité procédurale et de l'objet premier premier du recours, qui est de réviser la décision attaquée.

La demanderesse argumentait en réponse que l'attitude de la division d'examen (convocation à une procédure orale après seulement une notification, changements d'avis, introduction tardive de D6 et D7) l'avait empêchée de se défendre correctement. La Chambre estime toutefois que les changements d'avis étaient justifiés par les modifications apportées aux revendications et que D6 et D7 ayant été soumis avec la convocation à la procédure orale, la demanderesse avait eu le temps de les prendre en compte et de déposer des requêtes appropriées.

Etant donné que la précédente requête principale n'est pas admise dans la procédure, les objections soulevées contre elles ne créent pas de circonstances exceptionnelles au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.


lundi 28 novembre 2022

T574/17: objection tardive au titre de l'article 123(2) CBE

L'Opposante avait soulevé, pour la première fois lors de la procédure orale devant la Chambre, des objections au titre des articles 123(2) CBE et 54 CBE à l'encontre de la requête subsidiaire 14, dans laquelle les revendications de produit avaient été supprimées.

Ces objections constituaient par conséquent une modification des moyens au sens de l'article 13(2) RPCR 2020. Contrairement à ce que prétendait l'Opposante, le fait que cet article 13(2) n'était pas en vigueur au moment où la requête subsidiaire 14 avait été soumise (avec la réponse à son mémoire de recours) ne constitue pas une circonstance exceptionnelle.

La Chambre fait en outre remarquer qu'en application du pouvoir d'appréciation de l'article 13(2), une Chambre peut aussi appliquer les critères de l'article 13(1) RPCR 2020 (T2117/18, T172/17), en l'espèce la pertinence prima facie des objections.  La Chambre considère cette approche comme appropriée en l'espèce car cette requête n'a jamais été examinée jusqu'alors, l'opposition ayant été rejetée par la division d'opposition.

La Chambre tient en outre compte de l'obiter dictum du point 19 de l'avis G10/91, selon lequel "en cas de modifications des revendications ou d'autres parties d'un brevet pendant une procédure d'opposition ou de recours, il faut examiner en détail si ces modifications sont compatibles avec les conditions posées par la CBE (eu égard par exemple aux dispositions de l'article 123(2) et (3) CBE)."

La Chambre estime toutefois qu'on ne peut interpréter cette observation comme obligeant à admettre l'objection dans la procédure et à la prendre totalement en considération. Cela irait à l'encontre de l'article 114(2) CBE et de la jurisprudence selon laquelle une procédure de recours n'est pas la simple continuation d'une procédure de première instance. A l'époque de G10/91, le RPCR ne contenait en outre pas de dispositions quant aux moyens tardifs. 

L'obiter dictum de G10/91 est donc totalement respecté si la pertinence prima facie d'une objection est considérée dans le cadre de l'exercice du pouvoir d'appréciation de l'article 13(2) RPCR 2020.

S'agissant de l'objection au titre de l'article 54 CBE, l'examen prima facie est approprié car elle est basée sur le même usage antérieur déjà discuté pour la requête principale. Cet examen n'irait pas à l'encontre de l'économie de la procédure.

S'agissant de l'objection au titre de l'article 123(2) CBE, la Chambre prend également en compte le fait que dans le cas d'une procédure de limitation, la conformité à l'article 123(2) CBE doit toujours être examinée, ce qui montre que la CBE met particulièrement l'accent sur cette exigence lorsqu'il s'agit de modifications qui n'ont pas été examinées auparavant.


Une autre aspect intéressant de la décision porte sur la question des usages antérieurs. La Chambre considère qu'il n'était pas en l'espèce nécessaire de prouver une vente particulière d'un produit particulier pour démontrer au-delà de tout doute raisonnable que les produits avaient bien été rendus accessibles au public (T55/01). Il ressort en effet des auditions de témoins que le plafond acoustique en question était un produit de masse, les ventes étant de plusieurs millions de m² par an. La Chambre estime en outre que si l'on ne peut attendre d'un témoin qu'il se souvienne de tous les détails d'une production, il n'en est pas de même des éléments essentiels, en l'espèce la présence d'étapes de découpe et d'abrasion, laquelle avait nécessité une modification importante de la ligne de fabrication 3 ans avant la priorité du brevet en cause.


lundi 14 novembre 2022

T385/18: un exemple de circonstance exceptionnelle

La Titulaire avait soumis, après l'avis provisoire de la Chambre, des résultats d'essai sur le comportement électrique des pinces conventionnelles utilisées dans les appareils de dialyse ainsi que des annexes concernant les propriétés électriques des tubes conventionnels.


La Chambre considère que des circonstances exceptionnelles justifient l'admission de ces moyens tardifs dans la procédure. 

Dans son avis provisoire, la Chambre estimait que les valves de D18 avaient de manière inhérente une fonction d'isolation électrique du fait qu'elles étaient configurées pour comprimer complètement le tube en plastique et se basait notamment sur D19, qui mentionnait l'effet obtenu par la compression causée par un rouleau d'un système péristaltique sur la résistance.

Cet argument allait au delà de ceux exposés par l'Opposante dans son mémoire de recours. L'Opposante avait bien argumenté que la fermeture des vannes limitait le courant de manière à être considérée comme une isolation électrique, mais n'avait pas établi de lien entre D18 et D19 de manière à conclure que la fermeture complète du circuit résultait de manière inhérente en une isolation électrique. D19 n'avait été cité que pour preuve des connaissances générales concernant les caractéristiques isolantes d'une pompe péristaltique.

L'introduction, pour la première fois, de ce lien entre D18 et D19, constitue une circonstance exceptionnelle au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

Les tests ne font toutefois pas changer d'avis la Chambre. La réduction du courant de 2460 µA à 51 µA est considéré comme procurant une isolation électrique. La revendication 14 décrit d'ailleurs une limite haute à 500 µA.

Pour la même raison, la requête subsidiaire 1, soumise en même temps, et qui limite le courant à 50µA et moins, est également admise. La Chambre considère comme opportun le fait de réaliser des essais expérimentaux puis de limiter la portée des revendications sur la base de ces essais.


jeudi 27 octobre 2022

T2913/19: application de l'article 13(2) RPCR 2020 à des observations de tiers

Des observations de tiers anonymes avaient été soumises plus de trois ans après le mémoire de recours.


La Chambre rappelle que selon la jurisprudence établie, le pouvoir discrétionnaire de ne pas admettre des soumissions tardives s'applique aussi aux observations de tiers, car des tiers ne peuvent pas, d'un point de vue procédural, être mis dans une meilleure position qu'un opposant (T923/10). 

Les mêmes critères s'appliquent donc aux observations de tiers, à savoir ceux des articles 114(2) CBE et 12 et 13 RPCR.

Dans le cas d'espèce, la Chambre ne voit pas de raisons exceptionnelles justifiées par des raisons convaincantes au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

Les observations sont donc ignorées.


mercredi 19 octobre 2022

T424/21: première application thérapeutique

Cette décision est intéressante sur deux aspects.

Du point de vue procédural, la Titulaire avait, après convocation à la procédure orale, déposé des requêtes dans lesquelles les revendications dépendantes 4 et 5, qui subissaient des objections au titre de l'article 100c) CBE, avaient été supprimées. La présente Chambre (3.3.04) considère qu'une suppression de revendications constitue bien une modification des moyens au sens de l'article 13(2) RPCR 2020 (T494/18). 

La Chambre fait toutefois remarquer que cette modification ne change pas le cadre juridique et factuel du dossier, et en particulier n'a aucun impact sur les objections formulées contre les autres revendications, discutées dans le mémoire, la réponse et l'avis provisoire. L'Opposante n'est donc pas désavantagée par l'admission de la requête. Une interdiction générale de toute suppression de revendications dépendantes pourrait en pratique obliger à déposer à un stade précoce une grande quantité de requêtes subsidiaires, ce qui n'est pas dans l'intérêt de l'économie de la procédure et n'est donc pas en ligne avec l'approche convergente. Le fait d'améliorer l'économie de la procédure sans donner lieu à de nouvelles objections peut ici constituer une "circonstance exceptionnelle" au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

Une autre question discutée portait sur la suffisance de description de l'anticorps revendiqué. Les revendications 5 et 6 portaient sur une première application thérapeutique ("pour la mise en œuvre en tant que médicament") selon l'article 54(4) CBE. 


Le brevet démontrait que l'introduction de certaines mutations dans des anticorps thérapeutiques connus permettait d'obtenir des effets pertinents, connus dans plusieurs contextes thérapeutiques. Il paraît donc plausible que ces anticorps puissent être utilisés comme médicament dans le cadre de ces thérapies. Des preuves post-publiées (essais cliniques) le confirment.

La question était donc de savoir s'il fallait limiter les revendications aux thérapies en question.

La Chambre ne voit rien dans la CBE ni dans la jurisprudence qui permette de conclure qu'un brevet devrait démontrer qu'une substance est efficace contre toutes les maladies possibles pour qu'une première application thérapeutique soit considérée comme suffisamment divulguée. Il suffit au contraire de montrer que la substance est efficace pour une utilisation thérapeutique particulière. 


mercredi 14 septembre 2022

Admission de nouveaux documents

Aujourd'hui, deux décisions dans lesquelles la Chambre a admis dans la procédure des documents soumis pour la première fois en recours (art 12(4) RPCR2007) ou après la convocation à la procédure orale (article 13(2) RPCR2020).

Dans la première décision (T538/19), l'Opposante et la Titulaire avaient soumis avec le mémoire de recours ou la réponse des rapports d'essais D55 à D57 portant sur les exemples 1 et 6 de D10. 

D55 venait en réponse à une objection soulevée pour la première fois pendant la procédure orale par la division d'opposition, selon laquelle les rapports d'essais D40 et D47 déposés par la Titulaire ne permettaient pas de conclure que la teneur en eau des exemples en question était comprise dans la gamme revendiquée. Le dépôt de D55 est donc une réponse de bonne foi à D47, lequel avait été déposé seulement 2 mois avant la procédure orale. D55 et D56 venaient quant à eux répondre en temps utile à des objections soulevées dans le mémoire de recours sur le même sujet.

La soumission de D55-D57 au début du recours constituait donc un développement normal de la procédure de recours sur opposition.

Manière non-autorisée pour soumettre des documents tardifs

Dans la deuxième décision (T1724/19), la Titulaire avait soumis, après l'avis provisoire de la Chambre, le document A50 au soutien de ses arguments. La Chambre note que le document a été apporté en réponse à une interprétation de la revendication par  la Chambre qui différait de celle adoptée par les parties et par la division d'opposition.

Le dépôt de A50 venait en soutien de l'interprétation par la Titulaire du terme "polypeptide GDF15 humain", interprétation déjà contenue dans son mémoire de recours. Le document et les soumissions qui lui sont liées ne soulèvent donc pas de nouvelles questions et n'augmentent pas la complexité du dossier. La Chambre considère en outre que les Opposantes ont eu 1 mois pour se préparer à discuter ce document, ce qui en l'espèce était suffisant.

mardi 23 août 2022

T355/19: contre la tactique du salami

En procédure orale, la Chambre avait émis l'opinion selon laquelle les requête subsidiaires 1 à 3, déposées 1 mois avant la procédure orale, ne respectaient pas le critère de l'admissibilité manifeste, compte tenu du disclaimer introduit dans la revendication 9. La Titulaire avait alors modifié ses requêtes en supprimant cette revendication 9.

Nous avons vu que dans certaines décisions il a été jugé qu'une suppression de revendications indépendantes ne constituait pas une modification des moyens au sens de l'article 13 RPCR 2020. La présente Chambre n'est pas de cet avis et suit au contraire les décisions T494/18 et T2091/18

Le RPCR ne fournit aucune base pour soutenir l'argument selon lequel la suppression de revendications ne modifie pas les moyens présentés par une partie dans la mesure où elle n'entraîne pas une modification ou une nouvelle appréciation de la situation factuelle. Les questions concernant la suite de la procédure, la nécessité de conduire des investigations supplémentaires et de savoir si les critères énoncés à l'article 13(1) RPCR sont remplis doivent être traitées séparément de la question de savoir si les moyens présentés par une partie ont été modifiés au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

La Chambre considère en particulier que si une requête qui n'est pas admissible le devient après suppression d'une revendication et qu'en conséquence, un brevet qui devait être révoqué peut être maintenu, il y a clairement une modification des moyens invoqués. Il serait illogique de prétendre que les moyens invoqués ne sont pas changés si les résultats sont diamétralement différents.

La suppression de la revendication 9 est donc bien une modification des moyens, de sorte que la recevabilité des requêtes est soumise à l'appréciation de la Chambre en vertu de l'article 13(2) RPCR 2020.

En l'espèce, l'opinion de la Chambre quant à la revendication 9 reprenait les observations de l'Opposante contenues dans son mémoire de recours. Il n'y avait donc aucune raison d'attendre l'opinion de la Chambre pour y répondre.

La Chambre fait en outre remarquer que la Titulaire n'a pas toute latitude pour adapter les revendications pendant toute la procédure de recours. Cela vaut en particulier lorsque le point de départ est un jeu de revendications contenant sept revendications indépendantes et que des jeux de revendications modifiées ont été déposés à plusieurs reprises pendant la procédure de recours. Laisser cette liberté à une partie équivaudrait à lui permettre une approche "par tâtonnements" ou une tactique par élimination (tactique du "salami"), qui ne sont acceptables dans aucune procédure, et à plus forte raison dans le cadre d'une procédure judiciaire telle que la procédure de recours.



mardi 16 août 2022

T1042/18: le changement de point de départ est une modification des moyens

Pour la première fois lors de la procédure orale, l'Opposante a développé une attaque d'activité inventive en partant de D4 ou de D5. L'Opposante prétendait qu'ayant déjà formulé des attaques de nouveauté sur la base de ces documents, elle était en droit de les utiliser pour attaquer l'activité inventive. Elle argumentait qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau motif d'opposition.

La Chambre rappelle qu'en recours il existe des restrictions à la présentation de nouveaux moyens, provenant aussi bien de décisions de la Grande Chambre (G10/91, G1/95, G7/95) en ce qui concerne la prise en compte de nouveaux motifs d'opposition que de l'article 114(2) CBE et des dispositions du RPCR, concernant la recevabilité de moyens tardifs. Ces restrictions existent indépendamment les unes des autres et s'appliquent cumulativement.

En l'espèce, l'activité inventive inventive ayant été discutée en première instance, il ne s'agit pas d'un nouveau motif d'opposition. Il s'agit d'une modification des moyens au sens de l'article 114(2) CBE et de l'article 13 RPCR 2020.

Dans le contexte de l'article 13(2) RPCR 2020, tant une nouvelle combinaison de faits (par exemple le choix d'un autre document ou d'un autre passage d'un document comme point de départ d'une objection d'activité inventive) qu'une nouvelle combinaison d'éléments de fait et de droit (par exemple la référence à un document ou à un passage dans un contexte juridique différent) constituent une modification des moyens. (NDLR: en revanche, selon J14/19, un argument purement juridique, par exemple portant sur l'interprétation de la CBE, n'est pas un argument au sens du RPCR). 

Il y a donc bien modification des moyens lorsqu'un document utilisé uniquement pour attaquer la nouveauté est utilisé pour attaquer l'activité inventive.


A l'argument selon lequel on ne peut formuler une attaque d'activité inventive si l'on a argumenté que le document détruisait la nouveauté, la Chambre rétorque qu'au stade du recours une décision de première instance a été rendue, prenant en compte les contre-arguments de la Titulaire. Il est donc possible dans un premier temps d'argumenter un défaut de nouveauté, et au cas où la Chambre ne serait pas du même avis, d'invoquer à titre complémentaire un défaut d'activité inventive sur la base du même document. 




jeudi 11 août 2022

T1190/17: une nouvelle objection ne justifie pas toutes les modifications

La Chambre admet les requêtes subsidiaires 1 à 3 déposées en réponse à l'avis provisoire car en précisant la notion de "matériau structurant présentant une résistance à la fatigue élevée" elles répondaient à une objection formulée pour la première fois dans cet avis. Il s'agit donc de circonstances exceptionnelles (article 13(2) RPCR 2020).

En revanche, elle n'admet pas la requête subsidiaire 4, qui précise que la structure composite du câble de cœur est réalisée par des brins composites constitués d'un matériau structurant et d'un matériau radio-opaque. Cette modification ne répond pas à l'objection de la Chambre, mais plutôt à l'objection de défaut d'activité inventive retenue par la division d'examen pour rejeter la demande. Une telle requête aurait dû être déposée au moins avec le mémoire de recours.

Un nouvel argument de la Chambre (ici l'absence d'un effet technique clairement identifiable) ne justifie que le dépôt de requêtes qui répondent à cet argument; il ne constitue pas une porte ouverte à l'introduction de modifications qui vont au-delà de ce qui est requis pour réfuter l'argument.



 
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